Chapitre 3

 

 

Je rentrai chez moi après le dîner, prévoyant une soirée tranquille à légumer devant la télévision. Je n’avais guère eu le loisir de soirées paisibles ces derniers temps et cette perspective m’apparaissait, de manière surprenante, fort attrayante.

Il s’était passé tellement de choses dans ma vie dernièrement que je ne rentrais jamais tranquillement chez moi comme s’il s’agissait d’un havre de sécurité. Avant de déverrouiller la porte, j’activai et armai mon Taser. Une fois à l’intérieur, je m’adonnai à une inspection rigoureuse de chaque pièce avant de m’autoriser à me détendre.

Pendant un temps, j’avais essayé le vieux truc du bout de ficelle coincé entre le cadre de la porte et son battant pendant mon absence. En théorie, si la ficelle était toujours en place à mon retour, cela voulait dire que personne n’avait ouvert la porte. Le problème, c’était que je ne pensais pas toujours à la mettre en place avant de sortir et chaque fois que je rentrais chez moi et que je ne voyais pas la ficelle, mon cœur s’emballait et des images de hordes de démons envahissant mon appartement me venaient alors à l’esprit. Même quand la ficelle se trouvait à l’endroit où je l’avais laissée, je ne me sentais pas complètement à l’aise avant d’avoir vérifié de mes propres yeux que j’étais bien seule. Je me sentais toujours un peu stupide en finissant mon inspection, mais cela ne m’empêchait pas de la faire.

Satisfaite de ne pas avoir trouvé de croque-mitaine attendant pour me tuer, je me laissai tomber sur le canapé, me saisis de la télécommande et essayai d’allumer le téléviseur. Rien ne se produisit. J’avais oublié que les piles étaient mortes… J’avais prévu d’en acheter des neuves sur le chemin du retour.

Je rassemblai assez d’énergie pour me lever et allumer la télévision à la main quand une douleur soudaine me poignarda l’œil.

— Oh ! Merde !

J’appuyai mon doigt entre mon œil et mon nez, là où la douleur était la plus intense, mais elle avait disparu avant même que ma main se pose sur mon visage.

Ces derniers jours, c’était le seul moyen de communication que Lugh utilisait avec moi pendant que j’étais consciente. Il m’était arrivé, au cours de périodes de stress intense, d’être capable d’entendre sa voix dans ma tête, mais mon inconscient avait appris à le bloquer. Je préférais en fait la douleur à l’œil à sa voix dans ma tête qui me donnait l’impression d’être une cinglée.

— Est-ce qu’on est obligés de faire ça maintenant ? me plaignis-je, et Lugh répondit d’un nouveau coup de poignard.

Je grommelai de plus belle, mais supposai qu’il valait mieux en finir.

Une fois, alors que les méchants avaient été sur le point de me brûler vive sur le bûcher, j’avais volontairement laissé Lugh prendre le contrôle de mon corps pour me sauver la mise. Cela m’avait demandé un effort monumental et, bien qu’il m’ait redonné le contrôle par la suite, cette expérience m’avait profondément marquée. Récemment, alors que j’avais désespérément eu besoin de le laisser émerger, je m’étais retrouvée incapable de le faire. Lugh avait finalement réussi à prendre le dessus, mais à un moment où je ne le désirais plus du tout.

Je lui en avais vraiment voulu d’avoir pris le contrôle de mon corps sans ma permission et il m’avait promis que cela ne se reproduirait pas… à une condition : que j’apprenne à le laisser volontairement faire surface quand la situation l’exigeait.

C’est pourquoi je m’appliquais consciencieusement chaque soir à céder volontairement le contrôle à Lugh. Jusque-là, je n’y étais pas parvenue et j’avais le sentiment angoissant que cela n’allait pas évoluer. Je suis une obsédée du contrôle par nature et laisser un démon – même un démon aussi bienveillant que Lugh – maîtriser mon corps, c’était rendre réel mon pire cauchemar.

Je pris une profonde inspiration et fermai les yeux, essayant de me détendre suffisamment, histoire d’avoir un faible espoir de succès. Mes muscles restaient tendus et j’étais nerveuse au point d’avoir du mal à garder les yeux fermés, aussi je me levai et éteignis toutes les lumières avant de m’étendre sur mon canapé inconfortable en espérant que l’ambiance serait plus relaxante.

J’étais toujours raide et je pris même conscience que je serrais les dents. Après avoir expiré profondément, j’entrepris de mettre en pratique les exercices de relaxation que Lugh m’avait enseignés. Comme d’habitude, mon esprit continuait à tourner dans sa fichue roue pour hamster, analysant les réponses de mon corps au lieu de céder et de se laisser aller. J’eus l’impression de sentir le pincement d’une frustration qui n’était pas mienne, mais difficile d’en être sûre.

Je fis de mon mieux pendant une demi-heure sans parvenir à me détendre, encore moins à laisser Lugh prendre le contrôle. Il m’assena un nouveau coup de poignard douloureux, mais il devait se douter qu’il était inutile que je continue. Il me laissa donc en paix.

Je n’allai pas me coucher avant minuit passé, non pas parce que je n’étais pas fatiguée, mais parce que je savais que Lugh allait vouloir me dire deux mots cette nuit et je voulais retarder ce moment autant que possible. Ce ne fut que lorsque je commençai à m’assoupir sur le canapé que je décidai qu’il était temps d’affronter l’orage. Si je devais m’endormir et rêver de Lugh, je le ferais confortablement dans mon lit.

Une chose est sûre, dès l’instant où je perdis conscience, je me réveillai dans le salon imaginaire de Lugh. J’étais étendue dans l’étreinte douce comme du beurre d’un canapé en cuir, mes pieds nus posés sur les genoux de Lugh tandis que ce dernier me faisait face sur une ottomane.

J’ouvris la bouche pour protester contre le caractère intime de la situation mais, au même moment, je sentis son pouce chaud courir au centre de la voûte plantaire de mon pied droit. La pression était idéale et je me mordis la langue pour réprimer un gémissement tandis que mes orteils se tordaient de plaisir.

Ce soir, Lugh portait ses cheveux détachés, ses longues boucles noires de jais dissimulant en partie son visage, mais je vis qu’un coin de sa bouche se relevait d’un air amusé et satisfait. Le salopard savait toujours sur quels boutons appuyer.

Avant que j’aie le temps de m’en agacer, il prit mon pied dans ses mains et se servit de ses deux pouces pour rechercher le moindre nœud de tension afin de le soulager. Je décidai que protester contre quelque chose de si bon aurait été extrêmement stupide. Aussi, je fermai les yeux pour savourer ces sensations.

J’étais détendue quand il en finit avec mon pied droit et il aurait pratiquement pu faire de moi ce qu’il voulait quand il en finit avec le gauche. Puis il fit glisser ses mains le long de ma cheville, tout en malaxant mes muscles. C’était fichtrement bon, mais je ne pus m’empêcher d’ouvrir les yeux et de découvrir que le bas de survêtement que je portais au début du rêve avait disparu. Je n’étais vêtue que d’un tee-shirt et d’une petite culotte.

Comme mes pieds étaient toujours posés sur les genoux de Lugh, j’enfonçai instinctivement un de mes talons dans son bas-ventre pour décourager ses mains vagabondes. Bien sûr, puisque son corps n’était qu’une illusion, cela ne le découragea pas le moins du monde. Pire, il referma les cuisses autour de mon pied, le maintenant en place et l’appuyant contre son érection. Je dus réprimer un frisson. J’ai de grands pieds pour une femme et sa trique s’étirait de mon talon à mes orteils.

— À moins que tu auditionnes comme star de films porno, tu devrais envisager d’adopter des proportions plus réalistes, lançai-je, bien que je sois à bout de souffle.

Il éclata de rire, un bruit aussi délicieux que le chocolat le plus noir.

— L’avantage des rêves, c’est qu’ils ne sont pas assujettis à la réalité.

J’essayai de dégager mon pied emprisonné mais je ne pourrais rien faire sans qu’il me l’autorise. C’était une des raisons pour lesquelles je n’avais pas particulièrement tenu à le voir ce soir : ses approches de flirt étaient de plus en plus insistantes. Et de plus en plus difficiles à combattre.

— Tu vas arrêter, oui ? Je ne suis pas d’humeur joueuse.

Il me regarda intensément, penchant sa tête sur le côté, l’air pensif. Puis il relâcha mon pied et mon bas de survêtement réapparut.

— Oui, je vois ça, admit-il.

Un point pour moi !

— Bien entendu, je ne suis pas non plus d’humeur à me faire remonter les bretelles, alors si c’est ce que tu as en tête, tu ferais mieux de laisser tomber tout de suite.

Je m’assis bien droite et posai mes pieds par terre.

L’ottomane disparut, remplacée par un fauteuil qui se trouvait trop près du canapé. Lugh savait parfaitement à quel point j’appréciais mon espace personnel, mais cela m’aurait demandé trop d’énergie de protester.

— Tu dois apprendre à me laisser prendre le contrôle, dit-il simplement.

Je me renfrognai.

— Ouais, je sais, je fais ce que je peux.

— Non, c’est faux.

Il y a des gens qui ont un de ces culots !

— Je ne sais pas ce que tu attends de plus de moi. J’ai essayé toutes les techniques de relaxation que tu m’as apprises. Je ne sais simplement pas comment mettre en veilleuse mon besoin de tout contrôler.

— Tu y arriverais si tu en avais vraiment envie, mais tu résistes encore.

— C’est faux ! rétorquai-je d’une voix d’enfant irascible sans pouvoir m’en empêcher.

J’avais passé au moins une demi-heure ce soir-là à tout tenter pour m’efforcer de le laisser prendre le contrôle et cela faisait deux semaines que je pratiquais cet exercice tous les soirs. Je ne crois pas avoir jamais essayé quelque chose aussi fort de toute ma vie.

Lugh croisa les bras sur sa poitrine et s’appuya au dossier du fauteuil, l’air sérieux.

— Je t’accorde que tu y passes du temps, mais le cœur n’y est pas. Tu crains toujours que je ne te redonne pas le contrôle si tu me laisses émerger.

Je retins la protestation que j’étais sur le point de formuler, parce que je savais reconnaître la vérité quand je l’entendais. La confiance n’avait jamais été mon fort et le peu dont je savais faire preuve avait été mis en pièces par une série de trahisons qui m’avaient laissée chancelante.

Je baissai les yeux sur mes mains, car il m’était trop difficile de soutenir le regard plein de reproches de Lugh.

— La dernière fois que tu as pris le contrôle, tu m’as bloquée et tu as tué mon père.

Être prisonnière de mon propre corps avait été l’expérience la plus terrible que j’avais jamais vécue. Et étant donné la vie que je menais, c’était beaucoup. J’avais été complètement coupée de ce qui s’était passé dans le monde réel, ma conscience retenue au fond d’une oubliette profonde, sombre et étouffante. J’aimerais croire que le fait qu’il ait utilisé mon corps pour tuer mon père – du moins, l’homme qui m’avait élevée comme sa propre fille durant toute sa vie, même s’il n’était pas mon père biologique – était la partie la plus éprouvante de ce souvenir, mais je sais que c’est faux.

— J’ai fait ce qui était nécessaire étant donné les circonstances, dit-il doucement.

— Je sais.

Mon père était possédé par un démon psychopathe qui en savait beaucoup trop pour qu’on le laisse retourner dans le Royaume des démons. Il devait mourir. Mais en dépit de la relation loin d’être excellente que j’avais entretenue avec mon père, en aucun cas je n’aurais pu le tuer. Alors mon ex-petit ami à mi-temps, Brian, m’avait immobilisée pendant que Lugh luttait pour faire surface. Il me restait encore à leur pardonner a tous les deux.

— Savoir que c’était nécessaire n’aide pas, dis-je.

Lugh apparut soudain à côté de moi sur le canapé et je sursautai.

— Tu ne pourrais pas tout simplement te lever et marcher du fauteuil au canapé ? Est-ce que tu es vraiment obligé de disparaître et de me faire peur ?

Il ne répondit pas. Typique.

— Nous sommes inextricablement liés l’un à l’autre dans un avenir proche.

— Ouais, comme si j’avais besoin que tu me le rappelles.

— Si tu n’apprends pas à me faire confiance, nous mourrons tous les deux.

Un rire amer m’échappa.

— Super, Lugh. « Fais-moi confiance ou crève ». Des paroles de sagesse qui empliront certainement mon cœur de sentiments chaleureux et légers.

Il émit un grommellement de frustration. Je m’attendais qu’il discute davantage. Au lieu de quoi, le rêve prit fin et je dormis jusqu’au matin.

 

Je ne comprenais pas pourquoi Lugh m’avait laissée en paix la nuit précédente et je me réveillai perplexe. Il n’était pas du genre à laisser tomber et je me demandais ce qu’il tramait.

Quoi qu’il soit en train de manigancer, il était évident que je ne pouvais pas faire grand-chose pour l’en empêcher, aussi je me persuadai de cesser d’y penser. Pour me changer les idées, je m’octroyai un moment de distraction en me connectant à Internet afin de chercher ce que je pouvais grappiller sur la famille Brewster.

Je ne m’attendais pas à trouver quoi que ce soit d’intéressant ni même de particulièrement pertinent. Tout ce que j’espérais, c’était détourner mes pensées de Lugh. Pourtant j’appris bien plus que je m’y étais attendue.

Claudia Brewster était exactement ce à quoi elle ressemblait : une femme d’affaires extrêmement brillante. Diplômée de Harvard, elle avait réussi à négocier son diplôme contre une place de vice-présidente dans une société de conseil en management. Son époux, Devon Brewster III, était l’héritier d’une vieille famille aisée et je ne trouvai aucune preuve qu’il ait jamais travaillé pour gagner sa vie.

Mais ce ne fut pas ce qui retint mon attention. Il s’avéra qu’il y avait bien plus de matière concernant Tommy Brewster que ce que Claudia avait daigné mentionner. À commencer par le fait que celui-ci n’était pas son fils biologique.

Personne ne semblait savoir exactement qui était vraiment Tommy Brewster. À l’âge de trois ans, il avait été découvert sur une scène de crime particulièrement terrible à Houston, après qu’un démon déchaîné eut tué quatre personnes. Un flic avait entendu des cris et était accouru. Le démon s’était saisi de Tommy et avait été sur le point de lui écraser la tête contre un mur quand le flic était arrivé. Il avait tiré dans la tête du démon, tuant son hôte mais sauvant Tommy du même coup.

La suite de l’histoire était encore plus étrange. Les policiers avaient été incapables d’identifier le moindre des quatre corps des victimes, bien que les analyses de sang aient démontré que deux d’entre elles étaient les parents de Tommy. L’enfant était trop traumatisé pour donner autre chose que son prénom aux policiers. Il avait été intégré dans le système de placement et avait fini chez les Brewster qui l’avaient adopté à l’âge de dix ans, après qu’il eut vécu avec eux pendant plusieurs années.

Les policiers n’étaient pas idiots. Ils savaient que le démon qui avait tué les parents de Tommy n’était pas mort – la seule façon de tuer un démon est de brûler vif son hôte –, et ils savaient qu’il était possible qu’il revienne dans la Plaine des mortels pour finir le boulot qu’il avait commencé. Quand Tommy avait été placé, les services sociaux avaient pris soin de bien couvrir ses traces afin qu’il soit impossible pour le démon de le localiser.

Alors comment avais-je pu apprendre tout ça sur lui s’il s’agissait d’un tel secret ? Parce que Tommy avait mis en ligne toute cette sordide histoire sur sa page Myspace, le tout assaisonné d’assez d’invectives antidémons pour que son profil soit supprimé si quelqu’un prenait la peine de s’en offusquer.

Il était fort possible que cette histoire soit un ramassis de conneries. J’avais cherché des articles sur le massacre et on ne pouvait absolument pas nier que ce crime avait eu lieu et qu’un enfant avait été découvert sur la scène. Mais ça ne signifiait pas que Tommy était bel et bien cet enfant. Pourtant, si c’était le cas, une telle histoire expliquerait le dévouement de Tommy pour Colère de Dieu.

Je savais qu’Adam saurait découvrir si Tommy était bien celui qu’il prétendait être. Et si son histoire se révélait vraie, alors son cas était encore plus suspect.

Qui était le démon qui avait massacré ces quatre personnes et qui aurait tué Tommy si le policier n’était pas arrivé à temps pour sauver ce dernier ? Pourquoi ce démon avait-il provoqué un tel carnage ? Et était-ce une coïncidence si, peu de temps après que Tommy eut vingt et un ans – l’âge légal auquel il pouvait s’inscrire en qualité d’hôte –, il se révélait être possédé ?

Les démons semblaient avoir eu beaucoup trop d’influence dans la vie de ce gamin. Au fond de moi, je sentais qu’il m’incombait de découvrir pourquoi.

Confiance Aveugle
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